samedi 8 avril 2017

Chronique : EWEN CHARDRONNET Mojave épiphanie


EWEN CHARDRONNET
Mojave épiphanie, 380 pages, 19 euros
Editions Inculte
Sous-titré ‘une histoire secrète du programme spatial américain’ voici un document passionnant qui se lit avec plus d’intérêt qu’une fiction tant son sujet, son / ses époques (1935 – 1955… des temps où le monde a changé plusieurs fois d’axes) et ses personnages sont bigger than life.
Tout commence au milieu des années 1930 une bande de potes d’universités utilise leur temps libre et les moyens de leur fac pour s’amuser à lancer des fusées qu’ils bricolent eux même de façon empirique en grands fans de Science-Fiction qu’ils sont. Après quelques accidents (on les surnomma le Suicide Squad) et alors qu’ils ont fait de ce hobbit un vrai sujet d’étude les voilà recruté à la veille de la seconde guerre mondiale par les services des armées américaines pour développer des ‘fusées’ qui au départ ont surtout pour objectif de permettre de faire décoller des bombardiers volumineux depuis des pistes courtes… Voilà qui serait déjà assez extraordinaire tant ces recherches les ont mis à la confluence de la physique, des mathématiques, de la chimie et de toutes les techniques les plus avancées de leur époque.
Mais justement l’époque : ils furent adolescents pendant la grande dépression, connurent la petite libération des esprits des mandats de Roosevelt et de son New Deal, puis la guerre et enfin le Maccarthisme et sa chasse aux sorcières dont ils furent victime, alors que Werner Von Braun et sa clique d’ex nazie (non repentis ?) prirent leurs places dans le développent de ce qui amena les américains sur la lune…
Les personnages qui apparaissent ici sont à la fois ballottés par ce destin mais également des acteurs très dynamique et actif de celui-ci.
Par exemple Jack Parsons qui fut celui qui testa et inventa les différents propergols qui firent décoller les différentes formes de fusées pendant des décennies. Il fut également un adepte d’Aleister Crowley le ‘pseudo’ mage et fut un de ces propagateurs en Californie où il créa une communauté qui s’essaya à la magie, l’amour libre et aux drogues… il finit par se faire piquer sa femme et son argent par L. Ron Hubbard (avant que celui-ci ratisse la planète entière avec la dianétique et la scientologie), fut persécuté par le FBI qui le soupçonnait d’être communiste et finit par mourir dans son laboratoire personnel en préparant des effets spéciaux pour un film de SF.
Frank Malina fut lui aussi de ces pionniers et il travailla d’arrachepied pour ce projet de fusées, mais il était également un progressiste un amateur d’art et s’intéressait aux recherches dans des techniques diverses et variées (ce temps permettait encore de se trouver à la croisée des chemins des sciences et des arts, comme une sorte de seconde renaissance). Rapidement au début des années 50 il comprit où l’hystérie anti communiste de son pays allait mener et les risques que cela lui faisait courir en tant qu’homme de gauche, ainsi il partit pour l’Europe où il participât très activement à la création et au développement de l’Unesco. Puis il se lança dans la peinture et créa la revue Léonardo qui depuis 50 ans s’attèle à montrer comment la recherche scientifique et l’Art peuvent se nourrir l’un l’autre.
A travers ces 2 exemples j’espère vous avoir donné envie de lire cette enquête historique. J’avoue m’être régalé à la lecture de ce livre foisonnant qui aborde tellement de domaines différents mais reste abordable quand on est ni un prix Nobel de physique ni un adepte des gnostiques.

[BT] 

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